De ornithomedia.com
La population portugaise de la Talève sultane a forteemnt décliné à la fin du 19ème siècle et au cours du 20ème siècle, principalement en raison de la destruction des zones humides et d'une chasse excessive.
Mais sa population augmente de façon très importante depuis les années 90, en raison de la protection de l'espèce, de la création de réserves naturelles et de réservoirs, de l'arrivée d'oiseaux venus d'Espagne et d'un programme de réintroduction initié dans la réserve Paúl de Arzila , au nord du pays.
Située sur la rive gauche du Mondego, dans la municipalité de Coimbra, cette petite zone humide accueille une intéressante variété d'oiseaux migrateurs et nicheurs.
Nous remercions Luis Providencia, adjoint à l'environnement à la mairie de Coimbra, pour nous avoir aidés à rédiger cet article en répondant à nos questions.
Présentation
La réserve naturelle Paúl de Arzila, située dans la municipalité de Coimbra, a été créée en 1988 pour protéger l'une des dernières zones humides typiques de la basse vallée du Rio Mondego (Baixo Mondego), qui comprenait autrefois un ensemble de marais de joncs et de roseaux régulièrement inondés.
Elle couvre 150 hectares au sein d'une zone protégée plus vaste de 535 hectares.
Elle est traversée par trois fossés : la Vala da Costa, la Vala dos Moinhos et la Vala do Meio.
La végétation est dominée par les massettes (Typha sp.), les Joncs des chaisiers (Scirpus lacustris), les Carex des rives (Carex riparia) et les phragmites (Phragmites australis). Le long des fossés poussent l'Iris jaune (Iris pseudacorus) et le Volant d'eau (Myriophyllum sp.).
Des saules, des peupliers et des frênes se développent en périphérie. Dans les environs s'étendent des peuplements de Pins maritimes (Pinus pinaster), de Chênes-lièges (Quercus suber) et portugais (Quercus faginea broteroi) et d'Eucalyptus (Eucalyptus globulus).
Vue de la réserve Paúl de Arzila (Portugal)
Source : SABINO
Accès
La réserve est située à 11 km à l'ouest de la ville de Coimbra et à 10 km de Montemor-o-Velho, près du village d'Arzila
Depuis l'autoroute A1, il faut sortir à Coimbra Sud et prendre la direction de Montemor-o-Velho-Alfarelos via l'EN 341. Le village d'Arzila est indiqué.
Depuis Figueira da Foz par l'autoroute A14, prendre la direction de Montemor-o-Velho, traversez le Rio Mondego, suivre la direction de Ribeira de Frades via la N 341. Le village d'Arzila est indiqué.
Un sentier de découverte circulaire de 1,5 km qui débute dans le centre d'interprétation (Centro de Interpretação) (ouvert de 9h à 17h30) de la réserve permet de découvrir la faune et la flore. Un observatoire a été construit, mais il est souvent inutilisable car il est régulièrement occupé par des essaims d'abeilles.
Les oiseaux
Héron pourpré (Ardea purpurea), Paúl de Arzila (Portugal)
Source : SABINO
La richesse de la réserve est avant tout ornithologique : 140 espèces d'oiseaux y ont été recensées. Le Busard des roseaux (Circus aeruginosus), le Râle aquatique (Rallus aquticus), la Talève sultane (Porphyrio porphyrio) (réintroduite), la Foulque macroule (Fulica atra), la Bouscarle de Cetti (Cettia cetti), l'Astrild ondulé (Estrilda astrild) et l'Etourneau unicolore (Sturnus unicolor) y nichent et sont sédentaires.
Dans les bois environnants, l'Autour des palombes (Accipiter gentillis) et l'Epervier d'Europe (Accipiter nisus) sont bien présents.
Au printemps et en été, il est possible d'observer le Faucon hobereau (Falco subbuteo), le Héron pourpré (Ardea purpurea), la Huppe fasciée (Upupa epops), la Rousserolle effarvatte (Acrocephalus scirpaceus), la Rousserolle turdoïde (Acrocephalus arundinaceus), la Cisticole des joncs (Cisticola juncidis), la Locustelle luscinioïde (Locustella luscinioides), l'Hypolaïs polyglotte (Hippolais polyglotta) et le Pouillot ibérique (Phylloscopus ibericus). Dans les bois clairs à proximité, on entend en juin-juillet l'Engoulevent d'Europe (Caprimulgus europaeus).
Durant les migrations (mars-avril et août-octobre), Paúl de Arzila constitue une halte importante pour de nombreux passereaux comme le Pipit des arbres (Anthus trivialis), le Gobemouche noir (Ficedula hypoleuca), le Gobemouche gris (Muscicapa striata), le Pouillot fitis (Phylloscopus trochilus), la Fauvette des jardins (Sylvia borin), la Locustelle tachetée (Locustella naevia) et le Phragmite des joncs (Acrocephalus schoenobaenus). L'habitat n'est pas favorable au stationnement du Phragmite aquatique (Acrocephalus paludicola).
En hiver, le Héron gardeboeufs (Bubulcus ibis), l'Aigrette garzette (Egretta garzetta), le Canard colvert (Anas platyrhynchos) (150 oiseaux en moyenne), la Sarcelle d'hiver (Anas crecca) (400 individus), la Bécassine des marais (Gallinago gallinago), la Bécasse des bois (Scolopax rusticola), le Vanneau huppé (Vanellus vanellus), le Pouillot véloce (Phylloscopus collybita) et le Bruant des roseaux (Emberia schoeniclus) sont les principaux visiteurs.
Tout au long de l'année, et surtout durant la période de nidification et de migration, la réserve mène des activités de captures et de baguages, dans le cadre du PEEC (Projecto de Estações de Esforço Constante).
A noter aussi la présence de la Loutre d'Europe (Lutra lutra).
La réintroduction de la Talève sultane dans la réserve
Talève sultane (Porphyrio porphyrio), Paúl de Arzila (Portugal)
Source : SABINO
La Talève sultane a connu un fort déclin au Portugal à partir de la fin du 19ème siècle et tout au long du 20ème siècle, en raison de la chasse et de l'assèchement des zones humides.
Dans les années 1920, elle nichait encore dans le nord du pays, atteignant la basse vallée du Rio Mondego, où elle a été notée sporadiquement jusqu'en 1975. Dans les années 80, il ne restait plus qu'une petite population dans l'Algarve, dans la réserve naturelle du Rio Formosa.
Mais à partir ses années 90, la population a recommencé à augmenter, sous l'effet combiné de la protection de l'espèce et de plusieurs marais, de la mise en eau de nouveaux plans d'eau qui ont été colonisés par la végétation, de réintroductions et probablement aussi en raison de l'arrivée d'individus en provenance d'Espagne, qui compte des centaines de couples.
La population totale dans le pays était estimée en 2002 entre 49 et 67 couples. En raison de sa petite taille, de sa fragmentation et de l'urbanisation, l'espèce reste toutefois fragile au Portugal.
La réintroduction de la Talève sultane dans la réserve Paúl de Arzila s'est déroulée entre 1998 et 2001 avec le soutien financier important du programme européen Life. Il avait cinq objectifs : établir un noyau reproducteur stable suite au lâché de plus de 30 individus (dont certains ont été équipés d'émetteurs), élever des oiseaux en captivité pour renforcer cette population, améliorer la qualité de l'habitat en éliminant les plantes exotiques et en favorisant les roselières, sensibiliser les populations locales et développer une technique de suivi basée sur la reconnaissance des chants de chacun des individus.
Luis Providencia nous précise que ce projet a été un vrai succès : la Talève sultane est désormais bien établie dans la réserve, avec quatre couples nicheurs. Des oiseaux ont été lâchés dans trois secteurs : les marais d'Arzila, de Taipal et de Madriz. Des individus ont par la suite colonisé d'autres endroits dans le pays, comme le marais de Boquilobo près de Golegã (Alentejo) ou la lagune de Pateira de Fermentelos près d'Oliveira do Bairro (Centre)
Un centre géré par l'Instituto de Conservação da Natureza (ICN) a été créé, d'autres oiseaux aquatiques ont bénéficié de l'amélioration de la qualité de l'habitat, de nombreux élèves des écoles environnantes ont été sensibilisés et l'innovante méthode de suivi de la talève par le chant (cet oiseau est autrement très difficile à étudier car il reste souvent caché dans la végétation) est efficace. En outre, quelques emplois ont été créés. Enfin l'expérience acquise pourra être utilisée pour mener d'autres réintroductions dans le sud du pays.
Mais les efforts doivent être poursuivis : il faut empêcher la fermeture du marais par le développement des arbustes, surveiller la chasse illégale, et lutter contre la pollution des eaux par les émissions de plusieurs usines de la région, le canal qui les draine en dehors de la réserve pouvant déborder en hiver.
D'autres zones humides à proximité
Luis Providencia nous conseille de visiter également dans la région du Baixo Mondego l'estuaire du Mondego (Figueira da Foz) et le marais Paul da Madriz, près de Soure.
Plus au nord, la vaste Ria de Aveiro est incontournable. A l'arrière de celle-ci, dans le secteur de Salreu, on trouve notamment une petite population d'Euplectes vorabé (Euplectes afer).
De nombreuses descriptions précises sur les spots ornithologiques portugais intéressants sont visibles sur www.avesdeportugal.info/locais.html.
Source
European Commision. Porphyrio - Porphyrio project - Reintroduction of the Purple Gallinule in the Lower Mondego River Valley LIFE98 NAT/P/005267. http://ec.europa.eu